Remobiliser les personnes les plus éloignées de l’emploi demande d’innover, d’expérimenter et de s’adapter afin de parvenir à lever les différents freins à leur insertion. A2F, organisme du réseau Léo Lagrange formation, a démarré Remob’, en février dernier, pour des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) de Saint-Nazaire (44). Activités et ateliers de cohésion en mouvement, découverte du territoire et des structures solidaires, utilisation des transports en commun, préparation au projet professionnel : tout est mis en œuvre pour remobiliser et faire sortir de l’isolement les participant.es à cette nouvelle action d’insertion.
Remob’ se déroulera tout au long de l’année 2024 dans le cadre d’un appel à projet lancé par le département de Loire Atlantique. Chaque promotion dure 6 semaines, hors vacances scolaires, 4 groupes seront accompagnés d’ici la fin de l’année.
« On était des solitaires qui ont fini par devenir solidaires »
L’un des premiers objectifs de Remob’ : resocialiser des personnes qui ne travaillent plus depuis au moins 2 ans et favoriser la rencontre avec les autres personnes du groupe. Emmanuelle Duchesnes, responsable ingénierie de formation précise : « nous avons limité à 10 participants pour favoriser la cohésion du groupe et faciliter les prises de paroles. Car comme ce sont des personnes assez isolées, un trop grand groupe aurait freiné la mise en confiance et donc l’intégration dans le collectif. »
Les bénéficiaires de l’action témoignent tous dans ce sens : il.elles valorisent les liens qui se sont créés entre eux et leur capacité retrouvée à échanger avec de nouvelles personnes. Cyril explique : « je suis casanier, ça me fait sortir de chez moi », Stéphane poursuit : « j’avais une vie d’ermite, je ne parlais plus avec beaucoup de monde et notre groupe s’entend bien, ça crée des habitudes de se voir et de discuter ensemble. On était des solitaires qui ont fini par devenir solidaires. »
Soft skills et confiance en soi
Lorsque la cohésion du groupe est acquise, le travail d’accompagnement peut démarrer dans de bonnes conditions. Pour des personnes éloignées depuis longtemps du monde du travail, retrouver confiance en soi en identifiant ses soft skills constitue une première étape pour préparer chaque bénéficiaire à se projeter dans son parcours.
Pour cela, Richard Reyes, le formateur, a animé des jeux et ateliers pour mettre en mouvement les participant.es et la salle a été aménagée de façon à éviter la position assise de manière trop fréquente. « Nous avons utilisé des tests de personnalité et des activités théâtrales, par exemple chacun devait décrire un autre participant, à partir de sa posture, de ses traits de caractère. Nous allons aussi utiliser les Archipels pour faire circuler les personnes dans la salle » détaille Emmanuelle.
Sortir de son micro-territoire, découvrir les aides et opportunités
Toujours dans l’objectif de mettre en mouvement, à l’instar de Pro Mouv, A2F a conçu un programme de sorties extérieures pour découvrir le territoire. Le groupe s’est rendu à l’événement Les Renversantes, autour des chantiers navals et de l’industrie aéronautique. A travers cette visite, les formateur.rices visent aussi la mobilité : « se rendre là-bas signifiait aussi utiliser le réseau de bus. L’un des bénéficiaires n’avait pas utilisé les transports en commun depuis des années et vivait uniquement dans son micro-territoire » explique la professionnelle.
Pour engager les personnes sur un parcours d’insertion professionnelle, il faut également lever les freins périphériques. Des rencontres ont donc été organisées avec des partenaires locaux, pour montrer les ressources et aides existantes à leur portée. Le garage solidaire peut être mobilisé pour des réparations sur une voiture, les Restos du cœur pour une aide alimentaire.
Un atelier a eu lieu également avec l’association La cravate solidaire, Emmanuelle raconte : « nous avons abordé l’apparence, la présentation de soi et la tenue vestimentaire. En revêtant une nouvelle tenue en adéquation avec un métier envisagé, nous avons amorcé la préparation à l’entretien d’embauche. » Et l’atelier a commencé rapidement à porter ses fruits ! « certaines personnes ont commencé à travailler sur leur apparence, un des participants par exemple a soigné sa barbe, ce qui n’était pas le cas auparavant. »
Ahmed raconte : « avant j’étais plus fermé, je dormais mal la nuit, maintenant je dors, j’ai des contacts, je parle avec des nouvelles personnes. » Béatrice complète : « j’ai beaucoup de préoccupations juridiques et judiciaires même. Participer à Remob’ ça m’a permis de penser à autre chose, d’avoir un sas de décompression. »
Préparer l’après Remob, esquisser une continuité de parcours
Remob’ veut semer des graines pour remettre en mouvement des personnes isolées et éloignées des codes du monde du travail.
Pour suivre l’impact de l’action, un entretien tripartite est réalisé avec chaque bénéficiaire, A2F et le référent de parcours qui a orienté vers Remob’, ainsi qu’un bilan intermédiaire en collectif. Et les participant.es ont été force de proposition ! « Ils ont demandé au formateur de rencontrer des professionnels, Richard l’a pris en compte et va les amener à un speed dating. »
Chaque activité vise à mobiliser les bénéficiaires vers une continuité de parcours et à préparer la fin de Remob’. La première promotion a démarré le 13 février et se termine le 23 avril, des pistes pour l’après sont déjà envisagées pour chacun des 7 bénéficiaires toujours en parcours : formation qualifiante ou certifiante et prépa Clé avenir, pour travailler sur le projet professionnel.
Stéphane, l’un des participants à l’action conclut : « grâce aux ateliers et visites j’envisage de nouvelles pistes, j’ai refait mon CV. Remob’ nous a remobilisé, et même si on est tous très différents, on partage de la sympathie et de l’empathie les uns pour les autres. » Avoir confiance en l’autre et retrouver le plaisir et le goût des autres : ce sont aussi des préalables indispensables à l’insertion sociale et professionnelle.
Pour garder le contact :
Responsable ingénierie de formation
emmanuelle.duchesnes@a2f.leolagrange.org
