8 enfants sur 10 se retiennent d’aller aux toilettes à l’école : à l’occasion de la Journée mondiale des toilettes le 19 novembre dernier, les résultats d’une nouvelle enquête réalisée par le collectif « À nous les toilettes » ont été diffusés et ont donné lieu à une conférence lors du Salon des maires à Paris le 22 novembre. Changer les usages des toilettes pour le bien-être et la santé des enfants à l’école est au centre de l’action de ce collectif depuis 2019, auquel participe le programme Les petits citoyens (LPC) de la Fédération Léo Lagrange, afin d’apporter son expertise pédagogique auprès des enfants de 7 à 11 ans.
Le manque de propreté des sanitaires et la peur du harcèlement
Parmi les différents motifs qui limitent l’usage des toilettes scolaires par les enfants, apparaît en premier lieu l’hygiène. C’est le cas de plus de la moitié des enfants qui se plaignent de l’état de propreté des toilettes à l’école.
Le tabou social autour des toilettes est aussi prégnant : les enfants redoutent de demander l’autorisation et n’ont pas envie de faire savoir qu’ils se rendent aux toilettes. De plus, des pratiques de harcèlement sont redoutées : un tiers des enfants se plaignent d’intrusion de leurs camarades lorsqu’ils sont aux toilettes et un quart subissent des moqueries.
Comme l’explique Catherine Jacquet, directrice du programme LPC : « C’est un lieu de discrimination impensée dans notre responsabilité collective. Repenser les toilettes à partir des usages des enfants et les rendre acteurs du lieu en les responsabilisant est indispensable pour leur bien-être ».
Ainsi, faute d’intimité et de surveillance, les toilettes sont devenues une zone de non-droit et d’impunité. Les objectifs du collectif « À nous les toilettes » sont rappelés au début de la conférence au Salon des maires :
- Aller à la rencontre des enfants et des parents pour comprendre et analyser le phénomène
- Fournir au personnel éducatif des outils pédagogiques pour accompagner et responsabiliser les enfants
- Réunir les différents acteurs concernés pour construire des solutions adaptées
L’enjeu du bâti et de l’aménagement de l’espace
Edith Maruéjouls, géographe et spécialiste des usages genrés des espaces scolaires, intervient depuis plusieurs années dans les établissements et a expérimenté des solutions qui ont démontré leur efficacité.
Elle propose de réorganiser les sanitaires non pas par sexe mais par classe d’âge. En effet, les enfants redoutent souvent de se retrouver malmené par des plus grands lors de leur passage aux toilettes. De plus, le rapport à l’intimité et au corps de l’enfant qui est visible avec l’usage des urinoirs en fait un angle mort pour le personnel éducatif. La sociologue détaille : « la suppression des urinoirs et l’installation de blocs sanitaires préserve d’une part l’intimité des enfants et ouvre ces espaces au regard de l’adulte qui peut venir surveiller ce qui s’y passe et en réguler l’usage si besoin. »
Laurent Esquenet-Coxes, député et Nathalie Delattre, sénatrice, se sont engagé.es sur cette thématique et prennent la parole pendant la conférence. Le député explique avoir co-signé une tribune à la suite du sondage, « le confort est nécessaire dans l’éducation, et pas que dans les classes, dans les toilettes également. » Il évoque l’existence de fonds qui pourraient permettre aux collectivités de financer des réaménagements des sanitaires dans les écoles. Il estime que : « les petites communes sont souvent démunies sur ces questions. Il faut qu’il y ait un accompagnement de l’Etat qui présenterait des solutions. »
L’engagement de la puissance publique
« Nous avons besoin d’un soutien d’ampleur. Je suis maman de 3 garçons qui ont aussi eu ce réflexe de se retenir à cause de l’état de leurs toilettes scolaires. En maternelle, il n’y a pas de séparation entre les toilettes ! Il faut un mouvement collectif et des expertises croisées. C’est notre rôle de parlementaire : impulser une mission d’information pour mettre ce sujet sur la table et faire des propositions de loi et de financement », argumente la sénatrice.
Plusieurs personnes dans l’auditoire prennent la parole pour témoigner, en tant que parents d’élèves, enseignants, anciens élèves, pour réclamer la présence d’adultes à côté des toilettes scolaires ou pour dénoncer les réactions d’élus locaux qui renvoient les parents à leur responsabilité éducative, quant au comportement de leurs enfants aux toilettes.
Edith Maruéjouls conclut la rencontre en rappelant la nécessité de continuer à expérimenter et évaluer les solutions mises en place dans les écoles. Elle évoque le partenariat avec Essity, Harpic et le programme Les petits citoyens qui crée des jeux pédagogiques pour sensibiliser les enfants et les responsabiliser. Le jeu de médiation ludique « À nous les toilettes » constitue aussi un outil pour les enseignant.es : en permettant l’échange et la libération de la parole, il.elles pourront mobiliser les collectivités et sensibiliser les parents. Enfin, elle insiste sur la réflexion à avoir sur le bâti et sur l’impact positif de la suppression des urinoirs au bénéfice des blocs sanitaires et de la répartition par âge et non pas par sexe.
Communiqué de presse du collectif « À nous les toilettes », sur l’enquête 2023
La Fédération Léo Lagrange était au Salon des maires 2023 et le programme Les petits citoyens a présenté son nouveau jeu de plateau sur les toilettes à l’école. Pour en savoir plus, voici la ressource dédiée sur Léo Pro
Pour garder le contact :
Catherine Jacquet
Directrice LPC
catherine@lespetitscitoyens.com