La Plateforme RSE (Responsabilité sociale des entreprises), instance consultative placée auprès du Premier ministre, a souhaité que ses membres expriment leurs réflexions face à la crise sanitaire, économique et sociale du Covid 19. L’ALLDC qui est l’une des parties prenantes s’est évidemment prêtée à cet exercice.
Quels sont les défis auxquels fait face votre organisation?
Le plus grand défi auquel est confronté notre organisation comme de nombreuses associations de consommateurs c’est de continuer à fonctionner et rester un véritable contrepouvoir face aux lobbyings puissants des industriels. Les financements publics alloués au mouvement consommateur dans son ensemble se réduisent d’année en année. Une vision à court terme de la consommation, une vision exclusivement économique de l’acte d’achat est encore très largement partagée par certaines entreprises, et certaines catégories de consommateurs.
Des engagements environnementaux et sociétaux sont trop peu encouragés et accompagnés par les pouvoirs publics.
La communication des grands groupes est peu lisible pour le grand public.
Une consommation effrénée qui n’est pas assez tournée vers des produits plus locaux,
Une communication trop dense, de qualité douteuse, voir illisible, est faite par les professionnels sur les produits.
Le rapport qualité/prix n’est pas toujours pertinent.
Une production délocalisée pose plus que jamais la question des conditions sociales de production et les questions relatives à l’environnement et au bilan carbone. Elle met en cause la sécurité des consommateurs et l’indépendance de la France.
Quelles sont les problématiques que soulève la crise pour votre organisation?
Sans évidemment ignorer le caractère dramatique de cette crise qui laissera des meurtrissures indélébiles pour bon nombre d’êtres humains, en prenant un peu de recul, ce choc a aussi la particularité de réveiller la conscience des citoyens par des torrents d’informations autant orientés que manipulateurs.
Dans ce contexte, il s’agit de recentrer l’ensemble des constats et propositions sur deux postulats : la priorité absolue à l’humain et la reconnaissance incontournable de notre dépendance à l’environnement. Comme il s’agit de postulats rien ni personne ne devrait pouvoir y échapper, ni gouvernance, ni entreprise.
Dans le domaine qui nous intéresse cela pourrait se traduire par : priorité aux besoins réels des consommateurs (l’utile avant le futile) et mise en œuvre généralisée de l’économie circulaire.
Le commerce de première nécessité a du se réorganiser et les consommateurs ont dû adapter leurs pratiques engendrant des problématiques nouvelles. Nous pensons que la pratique élargie du commerce en ligne, du drive, des circuits courts, laisseront des traces après le confinement.
L’un des enseignements à tirer de cette crise est la nécessité d’améliorer l’organisation des services publics liés à la santé et à l’éducation. Il faut reconnaître et confirmer que certains services publics sont indispensables à notre société, qu’il faut leur donner les moyens de fonctionner aujourd’hui et demain (service public de la santé, de l’éducation, de la justice.) Cela passe aussi par la reconnaissance des personnels en termes de qualification et de rémunération.
Dans le secteur privé il y a aussi des emplois indispensables à la bonne marche des approvisionnements, de la distribution, et de l’assainissement qui doivent être reconnus et revalorisés.
Il faudrait aussi pouvoir éliminer certain à priori qui, par exemple, laisseraient croire que la fonction publique est coûteuse et peu efficace et le secteur privé rentable et créatif. Partons du principe, pourtant évident, qu’ils sont complémentaires dans l’intérêt bien compris des citoyens et consommateurs.
Dans le domaine du numérique, cette crise a montré d’une part notre dépendance au numérique avec le danger de la perte de nos liberté individuelles et d’autre part le potentiel et l’efficacité quasi illimités de ces nouvelles technologies. Toute la problématique liée à ce secteur réside dans le maintien de cet équilibre précaire en donnant la priorité à l’utile vis à vis du futile, tout comme dans les autres domaines de consommation.
Il serait opportun de donner plus de poids aux organismes modérateurs comme la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés et de leur demander d’améliorer leurs échanges avec les organisations de consommateurs.
Il est nécessaire d’investir dans le domaine des sciences, de la recherche et de la culture avec des partenaires européens. La mise en commun des supports et outils de communication informatique et audio-visuel doit être recherché, comme par exemple le partenariat ARTE avec l’Allemagne.
Solidarité et partenariat devraient être les piliers de « notre prochain monde » à tous les niveaux : international, interdisciplinaire et interculturel.
Quelles sont les réflexions portées par votre organisation dans ce contexte?
La réglementation européenne relative à la protection des consommateurs ne prend pas en compte ces questions évoquées ci-dessus et doit évoluer.
Une politique agricole commune doit soutenir prioritairement une agriculture respectueuse de l’environnement.
La directive achats publics autorisant les critères RSE de recevabilité doit être modifiée.
Les accords internationaux doivent conditionner la signature aux respects des droits humains, sociaux et environnementaux par les futurs partenaires.
Il faut soutenir et, si nécessaire, nationaliser les entreprises en difficultés dont la production est jugée nécessaire pour le pays.
Quelle peut être la contribution de votre organisation à la résolution de la crise?
Il nous faut poursuivre et renforcer notre mission historique à savoir l’éducation à une consommation responsable, notre participation à la transformation sociale, notre implication dans des instances de concertation avec les pouvoirs publics, les organisations professionnelles, les ONG…
C’est aussi pour la collectivité tout entière que l’Association Léo Lagrange pour la Défense des Consommateurs s’implique. Qu’il s’agisse du respect des droits, de la qualité d’un produit/ service ou encore de l’élaboration de nouvelles normes ou réglementations, l’ALLDC agit en faveur de la moralisation des relations commerciales.
Elle s’engage pour mieux informer les consommateurs et promouvoir des produits non agressifs pour l’environnement, des aliments sains …
Plus que jamais elle doit pousser les entreprises à s’engager dans des démarches RSE s’appuyant sur la réglementation, la normalisation et la certification.
Elle doit soutenir les initiatives prises par des ONG pour que la loi française « devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre » soit portée au niveau européen.
L’Association Léo Lagrange pour la défense des consommateurs assure une présence de proximité en apportant aux citoyen.ne.s, particulièrement aux plus démuni.e.s, information, conseil et aide juridique. Elle met aussi en œuvre différents leviers au niveau collectif tels que la négociation à l’échelon national ou européen pour l’élaboration de nouvelles normes ou la participation aux campagnes nationales d’information et de sensibilisation.
L’éducation à la consommation est le pilier de l’action de l’ALLDC. Il s’agit pour elle de défendre le.la citoyen.ne dont les droits fondamentaux peuvent être lésés par les lois du marché, favoriser des filières de production plus respectueuses de l’homme et de l’environnement, développer une éthique de la consommation basée sur le commerce éthique et équitable, et contribuer à la transformation sociale.L’ALLDC, c’est
4 salariées
Une quinzaine de bénévoles actifs
71 lieux de permanences juridiques
Près de 10 000 heures de permanence chaque année
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