Depuis octobre 2022, les jeunes peuvent désormais entrer en formation BAFA dès 16 ans. Et cet abaissement de l’âge légal a soulevé de nombreuses interrogations chez les organisateur·rices d’accueils collectifs de mineur.es. Comment accueillir ces jeunes en stage pratique ? Quel est le cadre juridique en vigueur ? Comment les accompagner ? Le 6 juin, la Jeunesse au Plein Air (JPA) a proposé de répondre à ces questionnements lors d’un webinaire organisé en table ronde. Se sont succédé les interventions de Sandy Basile, directeur juridique de JPA, Kévin Boiveau, directeur général Aroéven Bretagne, Alexis Demoncheaux-Wemeaux, responsable du secteur animation volontaire des CEMEA, et de Béatrice Pitiot, coordinatrice enfance de la ville de Tarare, partenaire de la Fédération Léo Lagrange.
Juridiquement, la nouvelle mesure ne provoque aucun changement majeur
Le mardi 6 juin, c’est Christian Dominé, président de la JPA, qui ouvre ce webinaire sur l’accueil des jeunes de 16 ans en stage pratique du BAFA. L’abaissement de l’âge du passage du BAFA représente selon lui une occasion pour les jeunes de se former, à un moment de leur vie où ils·elles se responsabilisent et deviennent autonomes. Cela permet également d’élargir le nombre de jeunes qui s’engagent dans un travail citoyen. « Ils vont acquérir une expérience exceptionnelle. On est convaincu que cela va être profitable à toute l’éducation populaire et on s’en réjouit. Mais cet abaissement de l’âge légal a soulevé de nombreuses interrogations chez nos confédérés et des organisateurs d’accueils collectifs de mineurs : Comment accueillir ces jeunes en stage pratique ? Quel cadre juridique faut-il mettre en place ? Quelles sont les bonnes pratiques à adopter ? Ou encore quelles modalités d’accompagnement sont nécessaires ? », interroge-t-il.
C’est Sandy Basile, responsable juridique de JPA, qui a fourni les premiers éléments de réponse. Il le rappelle, c’est le Décret n°2022-1323 du 14 octobre 2022 qui atteste que « le BAFA s’adresse à tous les jeunes âgés d’au moins 16 ans au premier jour de la session de formation générale ». Au-delà de l’aspect citoyen et de la réponse apportée aux aspirations des jeunes de pouvoir s’engager dans une activité occasionnelle, « ce décret vise à pallier la pénurie d’animatrices et d’animateurs, amplifiée par la crise sanitaire », affirme-t-il. Et s’il a provoqué une augmentation des inscriptions de mineur.es au BAFA, juridiquement, aucun changement important ne s’opère. Aujourd’hui, une personne de 16 ans sans qualification peut tout à fait être embauchée en Contrat d’engagement éducatif (CEE). Par ailleurs, les formateur·rices et organisateur·rices ont l’obligation de veiller sur la santé et la sécurité des stagiaires en BAFA, qu’ils·elles soient majeur·es ou mineur·es, ainsi que des membres de l’encadrement (majeur·es et mineur·es). Il demeure cependant qu’avec des stagiaires mineur·es, ils.elles adopteront une attitude différente, avec un accompagnement plus vigilant ou soutenu, tout en les laissant s’épanouir dans leur apprentissage.
Il convient également de rappeler que même si cela vaut autant pour les 16 ans que pour les 17 ans, la durée de travail quotidienne de ces jeunes animateur·rices ne peut dépasser 8h, et que le plafond hebdomadaire est fixé à 35h.
Kevin Boiveau, directeur général des Aroeven Bretagne, s’est à son tour exprimé sur cette question centrale pour son organisme de séjours. Il affirme : « L’âge ne doit pas être un critère sur le recrutement. On doit baser le recrutement sur des savoir-faire et savoir-être ». Et pour preuve, lors d’une journée « 16 ans en action » organisée deux semaines plus tôt avec des stagiaires de 16 ans et plus, l’organisme avait pu démontrer que parmi les personnes présentes, aucune n’était capable de déterminer lesquel·les étaient les plus jeunes. « Quand on connaît l’âge des jeunes, on stigmatise, mais quand on ne le connaît pas, on ne s’en rend pas compte », explique Kevin Boiveau. Selon lui, cette nouvelle mesure représente une opportunité forte à plusieurs niveaux – comme le fait de découvrir un métier de passion et de s’engager plus tôt et pour 1 année de plus – mais elle doit s’accompagner de dispositions permettant de pallier les difficultés des plus jeunes, comme leur capacité réduite de mobilité.
Par ailleurs, face à la pénurie d’animateur·rices, cette mesure est selon Kevin Boiveau une bonne carte à jouer, mais elle ne doit pas être la seule : « Il faut d’autres cartes sur la table comme repenser la rémunération, ou encore le soutien financier pour les lieux d’accueil collectifs de mineurs ».
Même constat pour Alexis Demoncheaux-Wemeaux, responsable du secteur animation volontaire des CEMEA, et Béatrice Pitiot, Coordinatrice enfance de la ville de Tarare. Si le nombre de volontaires pour passer le BAFA augmente considérablement avec un nouvel accès à des jeunes de 16 ans engagé.es et motivé.es, il faut prendre en compte leurs besoins spécifiques. Par exemple, au moment de l’inscription, leurs familles sont plus présentes et ont besoin d’informations plus précises sur le cadre et le parcours de formation comme le lieu, les dates, les horaires, l’hébergement, etc.
Pour la coordinatrice enfance de la ville de Tarare, avec qui travaille la Fédération Léo Lagrange, un des défis principaux est de s’adapter aux conditions de travail spécifiques de ces jeunes. Mais dans cette ville qui propose des « BAFA citoyens » entièrement financés pour 8 jeunes, ainsi que des tarifs préférentiels pour le volet formation, l’abaissement de l’âge de passage du BAFA a tout de même permis de disposer de nouveaux profils plus matures qu’on ne pourrait l’imaginer, dans un secteur en manque de personnel.