Au cours des décennies passées, les métiers de la petite enfance ont beaucoup évolué, pourtant, beaucoup ignorent encore les exigences pédagogiques et les différentes missions de ces professionne.le.s. Auparavant jardin d’enfant, garderie puis crèche et multi-accueil, les structures petite enfance ne sont plus seulement un lieu où les parents déposent leurs enfants lorsqu’ils partent travailler, mais aussi et surtout, un lieu de socialisation pour les tout-petits et un espace ressource et d’accompagnement à la parentalité.
Le bien-être et l’accompagnement de l’évolution des enfants passent par une très bonne connaissance des parents et une co-éducation. Malik Vitalien, directeur du multi-accueil Les chatons de la Lilette dans le Pays de Gex (01) prend l’exemple de la motricité libre : « La motricité libre n’est pas adaptée à tous. Un enfant qui a eu un problème de séparation avec sa mère à la naissance, il sera très insécure, il aura davantage besoin des bras. Donc pour certains enfants cet espace est trop libre et il a besoin de plus de contenance. Pour comprendre l’enfant, nous devons bien connaitre les familles, c’est aussi notre rôle, de créer cette relation de confiance avec les parents. »
L’adaptation « longue », pour les familles
Si les parents entretiennent une relation de confiance avec les professionnel.le.s de la crèche, c’est au bénéfice de tou.te.s : enfants et professionnel.le.s. Toutefois, les parents ont parfois une vision erronée du quotidien et des réalités de la structure. Ainsi, certaines crèches dont celle des chatons de la Lilette ont mis en place l’adaptation longue. Malik précise : « Pour faciliter la familiarisation des parents avec la crèche, le père ou la mère passe toutes les matinées avec l’équipe pendant une à deux semaines. Il va faire le premier repas, le premier soin, le parent découvre ainsi comment l’équipe travaille. Il va observer mais ne verra pas forcément la différence entre une animatrice et une auxiliaire de puériculture. C’est le parent qui décide, en concertation avec l’équipe, du moment où il se sent prêt à confier son enfant et donc, à arrêter ses temps de présence à la crèche. C’est une approche pour créer du lien avec les professionnelles, c’est aussi cela la co-éducation et le co-accompagnement. »
Comme le parent se trouve en immersion au sein de l’équipe, il comprend alors ce qu’est l’accueil en collectivité, les maladies, les morsures entre enfants. Si quelque chose l’interroge, les professionnel.le.s l’incitent à poser sa question, pour éviter qu’il reparte chez lui avec un quiproquo. Pour Malik, cette adaptation est très bénéfique : « Ils sont plus rassurés, l’intégration de leur enfant est ainsi beaucoup plus sécurisante, il n’y a aucun secret, ils ont pu découvrir tous les aspects du multi-accueil. »
Inscrire l’accompagnement à la parentalité dans le temps
Cette année, l’équipe expérimente avec les parents des bébés et des moyens deux temps de rencontre d’une heure : un premier en janvier et le second vers juin/juillet. Le professionnel référent lors de l’adaptation, la famille et le directeur se retrouvent pour discuter de l’enfant dans un espace convivial au sein du multi-accueil. Pour la rentrée prochaine, le référent santé ou éducatif pourrait également participer à ces rencontres.
Ces temps d’échange permettent à l’équipe de se réajuster aux besoins des parents, d’apporter une écoute plus attentive et parfois de découvrir les parents différemment. Malik précise : « notre objectif est d’améliorer notre accompagnement et d’avoir un suivi des familles. En mettant en place ce dispositif de soutien à la parentalité, nous voulons agir sur l’étayage des parents dans leur rôle éducatif, répondre à leurs préoccupations et valoriser leurs capacités. En développant ainsi une relation de confiance avec eux, nous favorisons leur inscription au sein du projet de la structure. »
Le livret d’accueil
Toujours afin de développer les échanges et la relation de confiance entre les parents et les professionnel.le.s, Malik prépare un livret d’accueil. Celui-ci est en cours de finalisation, il contiendra entre autres des éléments de compréhension de l’évolution motrice et sociale de l’enfant, l’annuaire des structures de prévention du Pays de Gex et des lieux de ballade avec les tout-petits. Pour le directeur du multi-accueil, ce livret vise à « alimenter le quotidien du parent, il constitue un prétexte pour créer l’échange entre les professionnelles et la famille. Les contenus du livret sont des occasions d’échanger et nous amèneront collectivement à prendre ce temps-là. »
Un lieu ressource pour les parents
Malik veut être attentif aux familles afin de les accompagner dans leur choix de vie et d’éducation. Il prend l’exemple de la plagiocéphalie, le syndrôme de la tête plate. Il fait le lien avec l’allaitement : « dans les pays où l’allaitement est très développé, ce syndrome est beaucoup moins fréquent, car l’allaitement oblige à changer le côté sur lequel repose la tête de l’enfant. » Les parents se culpabilisent souvent, craignent de mal faire, le multi-accueil est aussi un lieu ressource pour eux. Et souvent les familles en sont étonnées ! Elles confient à Malik : « Nous ne pensions pas qu’en mettant notre enfant à la crèche il se passerait autant de choses pour nous aussi ! »
L’accompagnement à la parentalité se trouve bien au cœur de nos pratiques professionnelles dans la petite enfance, dans l’intérêt de tou.te.s et surtout des tout-petits !