Au lendemain du meurtre de Samuel Paty, les membres de l’équipe de l’INSTEP Nord-Île-de-France se sont réunis pour partager leurs émotions et leurs réactions face à ce drame. Un projet mené par une centaine d’apprenant.e.s et leurs formateur.rice.s a vu le jour et a été diffusé à partir du 9 décembre, pour la journée de la laïcité.
Les formations de l’institut de formation Léo Lagrange INSTEP Ile-de-France, dans les départements du 91, 93, 94 et dans les régions de Dreux et Mainvilliers, ont notamment pour objectif de favoriser l’intégration socioprofessionnelle des primo-arrivant.e.s, demandeur.se.s d’asile, bénéficiaires du RSA, en améliorant leur pratique et leur connaissance de la langue française.
Lorsque chaque formateur a retrouvé ses apprenant.e.s, ils ont voulu évoquer cet événement tragique avec leurs groupes et une minute de silence a été respectée. Marie-Pierre Gahéry, directrice de l’institut, explique : « nous nous sommes dits que cela ne servait à rien de s’arrêter là, Bachir a proposé de réaliser une exposition, qui sera en fait le final de l’action. ».
En effet, Bachir Benazzouz, formateur depuis plus de quinze ans à l’INSTEP a pris à bras le corps ce projet, accompagné de deux autres formateurs : « nous poursuivons un double objectif : tout d’abord, répondre à cet événement tragique ensuite, notre activité, ce n’est pas seulement l’apprentissage de la langue à des fins professionnelles, c’est aussi l’intégration à la société d’accueil et donc l’appropriation des valeurs de la République, et parmi celles-ci, la laïcité ! L’éducation populaire, c’est aussi la transmission des valeurs que sont la solidarité, la justice, la tolérance, la rencontre des autres ».
Ainsi, un travail collectif a été amorcé fin novembre, par quatre formateurs et une centaine d’apprenants. Plusieurs séquences pédagogiques apportent des éclairages particuliers sur la laïcité, ses fondements, ses dates et ses artisans. Bachir Benazzouz précise « les apprenants réalisent des recherches sur internet, afin de réaliser la biographie des artisans de la laïcité, une frise sur les grandes étapes historiques, c’est ce que nous exposerons dans nos locaux le 9 décembre. »
Leur travail sur l’apprentissage de la langue française se poursuit aussi via les valeurs de la République. Des séquences de travail se sont déroulées à partir du poème « Liberté » de Paul Éluard qui est devenu « Laïcité, j’écris ton nom ». Les textes de Tahar Ben Jelloun, Jean Pierre Simeon et René Philombe ont également fait l’objet d’études et d’appropriation par les stagiaires. Une mise en spectacle de chansons choisies par les apprenants aura également lieu le 9 décembre.
La création plastique permet aux formateur.rice.s et aux apprenant.e.s d’avancer dans leur programme tout en débattant sur nos valeurs partagées, Bachir explique : « nous avons réalisé un arbre de la laïcité en dessinant un arbre sur une grande feuille. Sur ce dessin, les apprenants ont ajouté des fruits et des feuilles sur lesquels ils ont écrit des mots en lien avec la laïcité, en français mais aussi dans leurs langues d’origine : l’ourdou, le bengali ou encore l’arabe. »
Les réalisations des apprenant.e.s seront diffusées tout au long de la semaine du 7 décembre, même si le 9 décembre, journée de la laïcité, en constituera le point d’orgue.
Si l’équipe porte ces valeurs chevillées au corps, Bachir Benazzouz a conscience de l’enjeu pour leurs apprenants, à s’approprier également le tryptique républicain et ce qui en découle : « ces valeurs sont intrinsèquement liées au bien vivre ensemble, car ils ont choisi de vivre en France et ils sont ou seront parents, il est donc important que ces notions puissent les imprégner. Nous avons des publics issus de pays, de cultures et de croyances différentes, nous devons les amener à comprendre qu’il y a d’autres cultures, d’autres façons de faire et de voir, leurs enfants vont à l’école laïque mais dans la sphère privée, il y a bien une continuation des croyances ».
Bachir Benazzouz se rappelle les débuts du projet : les apprenant.e.s étaient un peu inquiet.ète.s, ils craignaient de ne pas réussir. Puis, peu à peu, ils.elles sont réellement rentré.e.s dans cette démarche, « ils n’attendaient plus le formateur, ils sont devenus acteurs, ils ont choisi les chansons eux-mêmes par exemple, ils étaient surpris et heureux ! ».
Telle est la vocation de l’éducation populaire ! Merci à Marie-Pierre Gahéry et Bachir Benazzouz pour leur engagement aux côtés des apprenants !
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