Lutter contre le harcèlement et le cyberharcèlement représente une priorité pour tous les acteurs éducatifs et nécessite leur coopération et la force de leur complémentarité pour faire face à ce fléau vécu dès le plus jeune âge. A Angers (49), territoire où le réseau Léo Lagrange est déjà très impliqué dans les dynamiques locales et partenariales, un escape game intitulé « entrons dans le jeu pour sortir du cyberharcèlement » a vu le jour et a essaimé grâce à la mobilisation et au travail commun de plusieurs acteurs et professionnel.les. Le collège Renoir, le pôle engagement Léo Lagrange Ouest, le conseil départemental et l’atelier Canopé 49 ont ainsi permis la diffusion dans tout le département d’un escape game pour lutter contre le harcèlement auprès des 11-15 ans.
Au départ : la volonté d’un CPE de lutter efficacement contre le harcèlement dans son collège
Lorsqu’il a démarré le projet d’escape game, Julien Plessis, conseiller principal d’éducation (CPE) au collège Renoir, réalisait déjà depuis plusieurs années des interventions pour sensibiliser les collégien.nes aux dangers du harcèlement. « Au cours de l’année scolaire 2020-2021, j’accueillais dans l’établissement 2 volontaires en service civique. Nous avons cherché une activité pour sensibiliser davantage les ados et nous avons eu l’idée de l’escape game » relate le professionnel.
Ils rédigent le scénario, une problématique amoureuse entre ados constitue le point de départ, ils collectent du matériel usagé tel un cartable, un carnet de correspondance et un agenda. A la fin de l’année scolaire, ils sont prêts et invitent des membres du collège et des partenaires à tester le jeu qui fonctionne très bien et convainc ! « Les mécanismes du harcèlement correspondent bien à l’escape game : trouver des indices pour identifier les signaux faibles du harcèlement que sont l’absentéisme, les mauvaises notes, les messages insidueux sur les réseaux sociaux… »
Le jeu a aussi vocation à faire coopérer et réfléchir ses participant.es sur leur positionnement : « ils sont acteurs et doivent trouver les solutions pour sortir du problème. Le jeu veut créer un mécanisme d’empathie, c’est la méthode de la préoccupation partagée. Les élèves se mettent en situation d’aide et de sauver leur camarade. »
Le conseil départemental Maine-et-Loire investi ce sujet et finance le développement de l’escape game
Julien Plessis contacte l’atelier Canopé du Maine-et-Loire, pour développer le jeu mais des financements sont nécessaires. A l’automne 2021, le conseil départemental du Maine-et-Loire demande à ses équipes d’intégrer dans l’offre éducative des dispositifs de lutte contre le harcèlement. Bénédicte Laumonier-Reeves, Cheffe de service sports et actions éducatives revient sur l’engagement de son institution : « nous recherchions un support ludique et mes collègues qui avaient testé l’escape game avaient été convaincues de sa pertinence. Nous avons donc financé l’intervention de Canopé et travaillé avec Julien Plessis pour faire évoluer l’escape game sur le thème du cyberharcèlement. »
Le scénario de l’escape game : Les joueurs reçoivent l’appel anonyme d’un adolescent qui s’inquiète pour un camarade en détresse. Depuis plusieurs mois, cet ami se fait harceler au sein du collège et sur les réseaux sociaux. Au moment où se déroule le jeu, cet élève est à la gare et s’apprête à monter dans le train pour fuir cette situation insupportable. Les joueurs doivent recomposer son histoire, trouver son numéro de téléphone pour le contacter et l’empêcher de partir.
A la fin de l’année scolaire 2021-2022 la nouvelle version du jeu est prête, 7 kits complets sont fabriqués, ils comprennent, entre autres : une tablette, un coffre-fort, un casier, une boîte à clés, un agenda, une trousse. Le département qui a initié cette nouvelle version de l’escape game et finance à 100% le projet, souhaite compléter le jeu par l’intervention d’un acteur éducatif expert du sujet : « lorsque s’est posé la question de l’animation du jeu et de l’intervention qui suivrait, Julien Plessis a suggéré de se rapprocher de Léo Lagrange Ouest. Nous nous sommes rencontrés et nous avons validé le partenariat avec le pôle engagement », détaille Bénédicte Laumonier-Reeves, qui connaît très bien le réseau Léo Lagrange grâce à la Newton Room permanente que sa collectivité soutient déjà financièrement.
Le pôle engagement Léo Lagrange Ouest est sollicité pour animer le jeu et l’intervention
Au cours de l’année scolaire 2022-2023, le pôle engagement Léo Lagrange Ouest a animé 115 interventions dans une vingtaine de collèges différents, touchant ainsi plus de 2500 adolescent.es.
Solène Porcheron co-anime les interventions avec un.e volontaire en service civique : « le scénario et les outils utilisés dans l’escape game sont très immersifs et permettent aux ados de s’imaginer eux-mêmes victimes et de transposer l’expérience à leur propre réalité. » La première heure est donc consacrée à l’escape game puis le binôme anime un débat avec la classe : « nous voulons les faire réfléchir à la notion d’empathie, à ce qu’ils ont ressenti pendant le jeu. Nous récapitulons avec eux ce qu’ils savent du cyberharcèlement puis nous débattons sur leur place d’acteur : comment réagir lorsqu’on est témoin sans se mettre en danger ? »
Cécilia Malet, responsable du pôle engagement, constate un réel engouement des adolescent.es pour ce jeu mais aussi pour le temps de débat auquel il.elles participent avec enthousiasme. Ces interventions ont également eu des effets sur des situations réelles de harcèlement : « certains ados victimes de harcèlement ou témoins ont saisi l’occasion de cette intervention pour parler avec un adulte. On transmet au jeune le nom du référent harcèlement dans son établissement et nous lui précisons aussi que nous ferons un signalement. »
Un escape game qui utilise les codes des adolescent.es
Bénédicte Laumonier-Reeves se félicite de la pertinence de cet outil : d’autres ateliers départementaux Canopé ont demandé à bénéficier de l’outil pour proposer également l’escape game sur leur territoire. Pour la professionnelle du département, « ce jeu est tout à fait adapté aux pratiques des jeunes, car il utilise les réseaux sociaux, leur vocabulaire, leur mode de relation. Nous allons continuer ces prochaines années à proposer cette intervention dans notre catalogue d’offre éducative pour les collèges de Maine-et-Loire. »
Le pôle engagement LLO a été renouvelé pour la 2ème année et continue donc à animer l’escape game pendant toute l’année scolaire 2023-2024. Cécilia souhaite également proposer l’animation de l’escape game à Rennes et Nantes, territoires où ses collègues sont déjà présents pour des actions de lutte contre le harcèlement.
Empathie et pouvoir d’agir pour impliquer les jeunes
L’escape game est en prise directe avec la réalité des ados et les positionne en tant qu’acteurs, point essentiel pour Julien Plessis : « il ne faut surtout pas être dans la moralisation. Le jeu crée un mécanisme d’empathie et les participants, les collégiens, vont se mettre en mouvement ensemble pour sortir de l’escape game et de l’enfermement du harcèlement subi par le personnage du jeu. » Développer l’empathie et le pouvoir d’agir constituent quelques-unes des clés pour lutter contre le harcèlement.
L’escape game « entrons dans le jeu pour sortir du cyberharcèlement » et l’intervention qui suit sont le fruit d’un travail partenarial local réussi. Il s’appuie sur les savoir-faire de plusieurs acteurs éducatifs complémentaires, habitués à travailler ensemble et qui partagent la volonté commune de tout mettre en œuvre pour lutter contre le problème du harcèlement. Le collège Renoir, via Julien Plessis, Léo Lagrange Ouest et le conseil départemental Maine-et-Loire montrent la voie et une démarche exemplaire.
Pour garder le contact :
Cécilia Malet
Responsable du pôle engagement Léo Lagrange Ouest
cecilia.mallet@leolagrange.orgSolène Porcheron
Chargée d’intervention
solene.porcheron@leolagrange.org