80% des enfants interrogés déclarent se retenir d’aller aux toilettes lorsqu’ils sont à l’école. Les enjeux liés à l’usage des toilettes scolaires sont multiples, en termes de santé publique, de harcèlement et de bien-être à l’école. C’est pour cette raison que le programme de la Fédération Léo Lagrange Les petits citoyens est impliqué dans le collectif de partenaires « À nous les toilettes » et intervenait lors d’une table-ronde sur ce sujet le 23 novembre dernier, au Salon des maires et des collectivités locales.
L’ambition des partenaires du programme « À nous les toilettes »
Le collectif est composé de plusieurs acteurs, issus de secteurs d’activité différents mais complémentaires pour répondre aux enjeux des toilettes à l’école :
- Les petits citoyens (LPC), dont les outils pédagogiques visent à éveiller les consciences des enfants sur les sujets de société, les préparant à devenir des citoyens engagés et éclairés
- L’ARObE avec Edith Maruejols, géographe et sociologue spécialiste du genre, elle travaille particulièrement sur les aménagements égalitaires des espaces scolaires, en élémentaire et au collège, ainsi que sur les relations filles-garçons dans ces mêmes espaces
- Les groupes Reckitt et Essity, spécialistes des produits d’hygiène et de santé
Ils partagent une volonté commune de briser le tabou de l’hygiène et de la sécurité dans les toilettes scolaires et s’investissent dans cette démarche partenariale afin d’apporter des solutions durables aux problématiques rencontrées par les enfants dans l’usage des toilettes scolaires.
Ils ont défini 3 grands axes d’action :
- Permettre une meilleure compréhension des problématiques rencontrées et de leurs impacts
- Sensibiliser à ce sujet les parents, la communauté éducative, les collectivités locales
- Proposer des solutions et outils pédagogiques adéquats pour aider les adultes à aborder ce sujet avec les enfants
Un sujet qui préoccupe enfants et adultes, mais les tabous persistent
Le nouveau baromètre commandé en 2022 par les partenaires du programme « À nous les toilettes » rappelle les problématiques récurrentes et déjà observées lors des précédents baromètres : une propreté des lieux très insatisfaisantes, du matériel manquant ou en mauvais état, un manque d’intimité, ainsi qu’un sentiment persistant d’insécurité suscité par des incivilités qui ont lieu dans les toilettes ou à proximité.
Parmi les enseignements intéressants de cette enquête, la différence de perception entre les parents et leurs enfants : seulement la moitié des enfants estiment qu’il est facile d’évoquer les problèmes qu’ils rencontrent dans les toilettes à l’école, alors que les trois quarts des parents pensent que leurs enfants en parlent facilement.
8 enfants sur 10 annoncent se retenir d’aller aux toilettes lorsqu’ils sont à l’école, en raison des motifs évoqués précédemment. Les principales conséquences pour eux de cette stratégie d’évitement sont les suivantes : des maux de ventre, des difficultés de concentration, des douleurs lorsqu’ils se rendent finalement aux toilettes, une perte d’appétit, l’envie de pleurer et ils évitent de boire même s’ils ont soif.
Instituer la mixité dans les toilettes à l’école et aider les enfants à réinvestir ces lieux
Au-delà de ces impacts directs sur la santé et la concentration, Edith Maruejols identifie des conséquences sur les représentations genrées des jeunes enfants et les relations filles-garçons qui en découlent.
« La non-mixité des blocs sanitaires a invisibilisé les problématiques. Puisque les enfants sont séparés, il ne doit pas y avoir de difficultés. Toutes les études d’impact démontrent le contraire : les toilettes sont le premier lieu de violence à l’école. La distinction filles-garçons masque d’autres distinctions plus pertinentes comme celle entre petits et grands. Les enfants ont peur souvent des plus grands, » expose la géographe pendant la table-ronde.
Le rapport au corps de l’autre, la pudeur et l’intimité sont au cœur de l’analyse, elle poursuit : « garantir l’intimité c’est aussi entendre la demande de pudeur des garçons, en enlevant par exemple les urinoirs. Ce qui permettrait aussi la surveillance de l’adulte, car pour l’instant ces espaces sont imperméables à leur regard. »
Edith Maruejols a mené plusieurs expérimentations, dont la mixité des toilettes, initialement mise en place en raison de protocoles sanitaires pendant la pandémie de Covid. Afin d’éviter les brassages d’enfants, certains sanitaires étaient réservés au CP, CE1 et CE2, d’autres au CM1 et CM2. « La mixité a eu plusieurs conséquences : la rencontre avec le corps de l’autre a fortement diminué la stagnation dans ces espaces, donc moins de dégradation, moins d’incivilité et plus de propreté. Les urinoirs ont été équipés de planches pour plus d’intimité, les cabines ont été mieux isolées pour sécuriser leur usage. Les enfants ont été incités à investir ces lieux en les décorant. Résultat : toutes les écoles qui ont expérimenté cette mixité l’ont conservé ! »
Retrouvez le podcast avec les témoignages d’Edith Maruejols et Catherine Jacquet
Des outils pédagogiques pour libérer la parole
Catherine Jacquet a rappelé l’implication depuis le début, du programme LPC qu’elle dirige, dans le collectif de partenaires « À nous les toilettes ». Elle a piloté plusieurs expérimentations d’outils pédagogiques dans des accueils de loisirs Léo Lagrange, pour identifier les difficultés rencontrées par les enfants, les amener à formuler des propositions d’amélioration, libérant ainsi leur parole sur ce sujet tabou.
Elle précise : « nous avons créé un livret de la collection « Et si on s’parlait » spécialement sur l’hygiène, afin de sensibiliser les enfants sur ce sujet. Nous sommes en train de concevoir des jeux pour favoriser l’expression des plus jeunes car ils ont beaucoup à dire sur leur usage des toilettes ! En les interrogeant, en les impliquant, ils sont responsabilisés et vont contribuer au changement. Dans certains accueils de loisirs Léo, les enfants ont mis en place des brigades pour sécuriser l’usage des sanitaires. Donnons-leur les moyens d’agir et accompagnons-les ! »
Rendez-vous début 2O23 pour découvrir ces nouvelles ressources pédagogiques et ludiques créées par LPC !
Vous n’avez pas pu assister à cette table-ronde ? Regardez son replay :
Le saviez-vous ? Un site web dédié au programme « A nous les toilettes » vient d’être mis en ligne. Suivez ainsi l’actualité de ce sujet passionnant aux nombreux enjeux éducatifs, sociaux et sanitaires !
Pour garder le contact
Catherine Jacquet
Directrice du programme Les petits citoyens
catherine@lespetitscitoyens.com