En France, environ un·e élève sur dix est victime de harcèlement pendant sa scolarité. Pour garantir à tou·te·s les jeunes l’accès à des cadres d’apprentissage sûrs, inclusifs, sains et en concertation avec l’ensemble des acteurs de l’éducation, la Région Nouvelle-Aquitaine a décidé de mettre en place un Plan de prévention et de lutte contre le harcèlement en milieu scolaire. Dans ce contexte, la région a soutenu 13 associations dans leurs actions portées au sein des établissements scolaires, parmi lesquelles la Fédération Léo Lagrange.
Des interventions auprès des professeurs, dans les lycées de toute la Nouvelle-Aquitaine
Cet appel à projets se constituait de 2 volets : des interventions devant les jeunes, auquel le pôle Engagement de la Fédération a répondu avec les outils de Démocratie et Courage, spécialisés sur les violences et le harcèlement ; et un plan de formation des adultes, pour lequel la Fédération a mis en place des plans d’actions locaux dans des lycées de la région.
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Sur l’année scolaire 2021/2022, la Fédération Léo Lagrange a réalisé en Nouvelle-Aquitaine 53 interventions de sensibilisation à la lutte contre les violences et pour le développement de l’empathie et du vivre ensemble. Elles ont concerné 22 lycées et 1632 jeunes ont été atteint·es. Après avoir renouvelé son soutien aux actions de la Fédération Léo Lagrange, la région a émis la demande de déployer son plan de formation des professionnels de l’enseignement dans 10 lycées entre 2022 et 2024.
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Le pôle Engagement accompagne le personnel enseignant de ces lycées par une démarche en 4 phases intégrant notions théoriques et perspectives d’actions. C’est Yannick SEGUIGNES, Directeur du pôle Engagement, qui mène ces interventions dans le Sud-Ouest de la France.
Observer, échanger, construire
La première phase du projet est une journée d’apports théoriques, qui consiste à comprendre les phénomènes de harcèlement, de violences et les enjeux de dominations, d’identité et de rapports sociaux. La particularité de ces interventions est son public. Habitué à sensibiliser des professionnel·les, Yannick admet que s’adresser à des professeurs demande de travailler sur la compréhension des « phénomènes structurels ». Il raconte : « Il est arrivé qu’avant une intervention on me fasse part d’une situation problématique sur un lycée. Je n’ai pas reçu les élèves directement, mais j’ai construit avec les professeurs des stratégies de débat sur le sujet. On va regarder les relations filles/garçons, la question du genre dans la relation entre les élèves, la place de la démocratie et de la liberté de la parole, la cogestion et l’arbitraire, des choses qui sont assez structurelles et qui permettent d’identifier des environnements propices aux violences et au harcèlement. C’est le cœur de ces interventions : on aide à penser la structure pour que le personnel enseignant se mette en mouvement de lui-même. »
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La phase 2 permet de peaufiner ces avancées avec le personnel enseignant. Lors d’une deuxième journée, Yannick visite l’établissement en situation d’activité normale, ce qui lui permet de produire un diagnostic qui sera présenté aux professeurs en phase 3. Yannick explique : « Quand on fait la journée de diagnostic, on regarde toujours la même chose : je demande à visiter l’internat, les vestiaires, les toilettes, les cours d’école lorsque les élèves y sont, je me balade dans les couloirs pendant les interclasses, je suis là 1h avant que le lycée ouvre afin d’être présent à la descente des bus, je fais le tour des stations de bus, je me déplace, j’écoute les gens. Après je m’entretiens avec des profs, avec un groupe d’élèves diversifié. Les lieux comme les vestiaires de sport, on y retrouve toujours les mêmes choses : les phénomènes de pression, le sexisme ordinaire, les violences sexistes et sexuelles. Je regarde aussi la sécurisation autour des établissements. »
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Toutes ces observations lui permettent non seulement de faire remonter les phénomènes qui l’interpellent, mais aussi de poser un diagnostic concret qui, lorsqu’il sera présenté en phase 3, donnera lieu à la définition d’un plan d’action sur 3 à 5 ans. « Dans le plan d’action, on propose les interventions de la Fédération Léo Lagrange mais aussi celles des autres associations comme le CEMEA, La Ligue de l’Enseignement ou la SEDAP, quand on trouve que leurs programmes sont adaptés aux besoins du lycée. L’idée c’est de travailler en non-concurrence avec les autres associations », précise le directeur du pôle Engagement.
Les journées thématiques ou la transmission du pouvoir d’agir
Enfin, en phase 4, Yannick intervient lors de deux journées de formation thématique, issues du plan d’action personnalisé pour chaque lycée. En fonction des besoins, l’échange peut tourner autour des thèmes suivants : identité de genre, développement des compétences psychosociales, animer des espaces de parole, dialoguer avec les familles, communiquer par l’écoute attentive ou encore lutter contre l’éco-anxiété. Et pour le sujet des réseaux sociaux, qui occupe une place importante dans les phénomènes de harcèlement, il l’aborde par le spectre de la psychologie des foules.
Dans les faits, Yannick tient à ce que ces journées restent des espaces d’échange, afin qu’elles inspirent le personnel enseignant pour qu’il puisse reproduire cette méthode. « L’idée c’est d’horizontaliser les choses, de créer des espaces de parole. On leur propose de mettre en place des radios de lycée, des journaux de lycée, des cogestions dans les classes, des débats, pour les habituer à cogérer l’espace public. Ça n’empêche pas le harcèlement, mais quand ça arrive il est plus facilement mis en lumière et la gestion de la situation est plus facilement collective », explique-t-il.
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Cécile Fleury, proviseure adjointe d’un lycée de Rochefort ayant terminé les 4 phases d’intervention témoigne de son expérience : « Dans mon établissement, j’ai voulu que l’on réfléchisse avec Yannick sur l’identité de genre et sur le développement des compétences psychosociales. C’était un choix de ma part parce que ce sont des thématiques qui me tiennent à cœur et parce qu’il faut que ça se développe dans les établissements. Ça a eu un gros impact au niveau des enseignants puisqu’à la rentrée, ils vont mettre cela en place dans leurs pratiques. »
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Bien qu’un diagnostic et qu’un plan d’action soient mis en place, ces interventions restent très loin de toute forme de « contrôle » ou « d’inspection ». Yannick insiste : « On n’est pas dans une évaluation morale. Notre travail, c’est de soulever des questions et d’exposer les enjeux ».
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Une chose est sûre, pour Cécile Fleury, ce programme a tout d’une réussite. « Les enseignants étaient très contents des interventions. L’idée c’est que petit à petit, les prises de consciences induites par ces enseignements se développent et que de plus en plus de collègues s’en emparent. Il faudrait que tous les établissements puissent bénéficier de ces formations. Nous on a 120 profs et 40 s’étaient inscrits à ces formations, ce qui représente un tiers d’entre eux. C’est énorme pour une journée de formation. De mon côté, je change d’établissement à la rentrée pour être responsable d’un collège, mais je vais rester en contact avec Yannick pour que l’on continue de travailler ensemble ! », conclut-elle.
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Aux intéressé·es par ces interventions de lutte contre le harcèlement : il y a toujours de la place pour les lycées qui souhaitent être accompagnés d’ici décembre 2024 !
Pour en savoir plus :La lutte contre toutes les discriminations, contre les violences sexistes et les harcèlements, les actions pour l’inclusion, l’égalité fille-garçon, le respect et la richesse de la diversité : les pôles engagements ont développé des interventions et formations pour tous les publics et dans toute la France. Et leurs expertises sont reconnues par leurs partenaires locaux !
Pour garder le contact dans votre région :Léo Lagrange Centre Est : Solène Egah-Clerc solene.egah-clerc@leolagrange.orgLéo Lagrange Ouest : Cécilia Malet cecilia.malet@leolagrange.orgLéo Lagrange Nord-Île-de-France : Aurélie Soulière aurelie.souliere@leolagrange.orgLéo Lagrange Sud-Ouest et Méditerranée : Yannick Seguignes yannick.seguignes@leolagrange.org